Petite fille de bonne famille, élève studieuse, brillante et extrêmement bien élevée, pourtant populaire et convoitée, Astoria semble discrète aux premiers abords. Elle ne parle pas ou quasiment pas. Elle a l'air d'une petite fille sage et exemplaire, mais en réalité, il n'en est rien. Elle est en fait quelqu'un de provocateur, égoïste, parfois insolent, désintéressé facilement, capable de manipuler et calculer tout ce qu'il peux, quand il veux. Mystérieuse, peut-être même un peu trop, il est assez difficile de savoir ce que la jeune fille pense réellement lorsqu'elle est en train de vous parler et peut changer de sujet au beau milieu de sa phrase si bien qu'il est plutôt difficile de la suivre. Si cependant elle parle peu, lorsqu'elle parle, on l'écoute. Très mûre et réfléchie, elle a souvent raison et devine juste. Décrite comme étant extrêmement observatrice et énigmatique, elle est également quelqu'un de relativement maladroit. Pensant toujours à la sécurité des autres avant la sienne et aimant particulièrement le danger, la mort est une chose qui ne lui fait pas peur. Enfin, si elle agit parfois comme une fille naïve, il est impossible de dénier le fait qu'elle en est exactement le contraire.

JUILLET 1992. ϟ Dix heures. Arabesque n°2 de Debussy résonnait dans tout le manoir. « Mademoiselle Astoria! Mais enfin, que regardez-vous par la fenêtre? N’avez-vous jamais vu de pluie de votre vie? Allons, concentrez-vous. » Levant les yeux au ciel, je soupirai discrètement avant de me repositionner en cinquième. Mademoiselle Matthews était une femme sévère, recherchant la perfection dans chacun de mes gestes et chacun de mes pas. Sa grâce avait, cela dit, toujours su me laisser sans voix. Du bout de sa baguette, elle me releva délicatement le menton. « Et… pointe, posé, dégagé, plié, cinquième, cinquième, seconde, plié, pointe, posé, seconde, plié, cinquième, cinquième. » Elle marqua une pause le temps de quelques secondes. « Nettement mieux. Travaillez cet exercice pour la semaine prochaine. C’est tout pour aujourd’hui. » J’acquiesçai d’un simple hochement de tête et finis par une révérence. Mademoiselle Matthews quitta la pièce d'un pas décidé. Alors que, seule, je m’apprêtai à continuer sans elle, c’est dans l’immense miroir que j’aperçus le reflet de mon père me regarder attentivement du fond de la pièce, l’air fier. Malgré ses airs d'antagoniste, mon père est une personne regorgeant de tendresse, que lorsqu'on le regarde, le temps s'arrête. Dont la courbe des yeux font le tour de notre cœur, et qu'à tous les cœurs ennuyés, une pause d'un instant à l'admirer nous fait simplement trembler. Un être au regard si profond que l'on sait facilement que c'est dans ses yeux que nos sentiments s'expriment le mieux. Souvent, on se souvient l'entendre nous dire que tout ira bien, toujours. Une personne qui a le don d'apaiser les cœurs démolis, les yeux débordants et les mains tremblantes. L'épaule sur laquelle pleurer, la personne avec qui on partage nos peines, et enfin qui, quand on touche le fond, nous relève et nous donne une raison d'avancer. Une personne qui ne doute et ne doutera jamais de nous, la perle au fond des mers. La personne tombée du ciel comme les flocons qui s'entremêlent dans nos cheveux en hiver, comme les larmes qui perlent aux coins de nos yeux. L'homme de ma vie. Curieuse, un sourire interrogateur se dessina alors au creux de mes lèvres. « Que regardez-vous comme ça Papa? » Il rit. « Rien ma fille, continuez. » Intriguée, je me retournai alors vers lui. Lentement, il se dirigea vers moi. « J'ai quelque chose pour toi. » Il me tendit là une enveloppe que je ne m'attardai pas à ouvrir. « Chère Mademoiselle Greengrass, nous avons le plaisir de vous informer que vous bénéficiez d'ores et déjà d'une inscription au collège Poudlard. Vous trouverez ci-joint la liste des ouvrages et équipements nécessaires au bon déroulement de votre scolarité. La rentrée étant fixée au 1er septembre, nous attendrons votre hibou le 31 juillet au plus tard. Veuillez croire, chère Mademoiselle Greengrass, en l'expression de nos sentiments distingués. Minerva McGonagall, directrice-adjointe. » Mon cœur venait-il d'exploser de joie?

1ER SEPTEMBRE 1992. ϟ L’été touchait à sa fin, laissant place à un ciel gris, triste et monotone, et ce un peu plus chaque jour. Néanmoins, cela ne me rendit pas moins heureuse, car s’il y a bien une chose que j’attendais impatiemment depuis un peu plus de trois cent soixante-cinq jours c’était bien la rentrée. Trois cent soixante-cinq jours? Lorsque ma sœur, de un an mon aîné, a reçu sa lettre, j’ai littéralement eu l’impression que mon cœur s’était déchiré en trente six mille morceaux et qu’un train était passé dessus au moins sept fois, si ce n’est plus. Pendant de nombreuses heures, de nombreux jours, de nombreuses semaines et enfin de nombreux mois, je m'étais longuement demandé pourquoi Daphné avait été si heureuse à l'idée qu'elle et moi allions, malgré les vacances, être séparées pendant une longue année. Il n'y a que le mois dernier que je compris, enfin, non seulement à quel point ma question était vide de sens, mais également et surtout pourquoi avait-elle été si heureuse. « Daphné, réveilles-toi! » La lumière du jour traversant, pourtant de manière agréable, les volets de sa chambre, ses yeux s'ouvrirent avec difficulté. « Laisses-moi dormir... » Elle me tourna le dos, ayant vraisemblablement aucune envie de se lever. Sans même prendre la peine de le faire silencieusement et décidée à la sortir de son lit, je n'hésitai pas un instant à ouvrir ses volets. « Tu sais quel jour... » Elle me coupa la parole et finit par la prendre à son tour. « Oui Astoria, la rentrée. La rentrée. » → Quelque peu inquiète, c'est le cœur battant à une vitesse éclair que je passai à travers le mur situé entre les voies neuf et dix. Aussi rouge et flamboyant qu'il l'est décrit dans les livres, quel bonheur que de voir, enfin, le Poudlard Express. L'heure des adieux tant et autant redouté par mes parents que par moi-même était arrivé. C'était tout bonnement la première fois que je m'apprêtai à me séparer d'eux aussi longtemps. Daphné les embrassa la première et n'attendit plus une seule seconde avant d'aller rejoindre son groupe d'amis. Vint mon tour, les mains tremblantes, la gorge nouée. « Prends soin de toi ma chérie. » C'est alors sur ces derniers mots que je quittai mon père et ma mère, tout deux le regard attendrit. Nous y voilà ma petite Astoria. → Les cheveux parfaitement disciplinés, je m'avançai fièrement et avec grâce parmi les premières années qui attendaient avec anxiété, eux aussi, leur passage sur le tabouret en bois. Gryffondor, Poufsouffle et Serdaigle pouvaient cela dit toujours courir, ma famille toute entière était passée par la maison de Salazar, ma propre sœur y était elle-même en deuxième année. Je savais donc avec conviction que je n'avais ma place dans aucune de ces trois maisons. Néanmoins et malgré moi, plus les secondes passaient, plus la peur réussissait, tout de même, à s'emparer de moi. Comment ce vieux débris de Choipeaux pouvait-il rendre mes mains aussi moites? « Astoria Greengrass. » Je montai les quelques marches avant de me retrouver assise face à Poudlard tout entier, affrontant le regard de tous, chacun d'entre eux m'observant avec la plus grande attention en l'attente du verdict. Alors que je sentis l'artéfact doué d'une âme se poser sur ma tête, une voix à la fois grave et douce se manifesta subitement, si bien que j'en sursautai. Je l'écoutai, tout en veillant à ne pas quitter le regard confiant de Daphné. « Encore une Greengrass, toute aussi jolie que son aînée... Tu m'as pourtant l'air d'être bien différente d'elle ma petite Astoria, je me trompe? Beaucoup plus douce... Peut-être même beaucoup trop douce... mais tout aussi déterminée: Serpentard! » Tandis que retentissaient les applaudissements de la table des verts et argents, et comme une bonne nouvelle n'arrive jamais seule, le professeur McGonagall profita du chahut afin de me communiquer quelques mots. « Mademoiselle Greengrass, l'académie royale des arts et de la magie a donné son accord quant à l'envoi d'un professeur. Vos cours de danse auront donc lieu chaque jeudi en fin d'après-midi pendant l'heure d'étude de vos camarades et commenceront dès demain, dans votre salle commune. » J'acquiesçai en laissant afficher le plus grands des sourires sur mon visage et finis par rejoindre mes nouveaux camarades sous le regard maintenant approbateur de ma sœur. De la table d'à côté, j'entendis ces quelques paroles: « Serpentard, tu m'étonnes. Regardes là, toute aussi fière et pourrie-gâtée que sa sœur. » Bien que blessant, leurs paroles m'importaient peu. Car ces gens là avaient raison, c'est bien ce que je suis: Astoria Greengrass, fière et pourrie-gâtée.

CINQUIÈME ANNÉE, 1997. ϟ Cher Journal, je sors de deux heures de colles. Cette... sang-de-bourbe. Poufsouffle, moche et pauvre qui plus est. De quel droit ose t-elle m'aveugler avec sa saleté d'appareil photo? Ce jus de citrouille dégoulinant sur sa tête devant la Grande Salle toute entière était tout bonnement mérité. Je la déteste, elle me déteste, l'affaire est classée. → Cher Journal, un an. Trois cent soixante cinq jours, douze mois, cinquante-deux semaines, cinq cent vingt-cinq mille neuf cent quarante-huit minutes. Un an. Et ce souvenir est encore là, toujours là. Chaque jour mais surtout chaque nuit. Mes cris n'en finissent pas. Ce souvenir comme cette marque à mon poignet, cette cicatrice, pâle, toujours quelques degrés plus froids que le reste de mon corps au touché, pourtant brûlante minuit passée, aussi étincelante que la peau d'un vampire dans la lumière du soleil, du vampire assoiffé de sang et sans pitié qui, ce soir là, a bien faillit me faire rendre mon dernier souffle. Un an, disais-je. Joyeux seizième anniversaire, Astoria Greengrass. → Cher Journal, l'année touche à sa fin. Enfin? L'ambiance ici est devenue si étrange. Vivement les vacances. P.S: BUSE terminés! (D.M. ♥) → Cher Journal, Albus Dumbledore est mort et personne n'ose en parler, même pas Daphné. Elle dit que je risquerais d'être déçue. Déçue de quoi? P.S: je ne te rouvrirai qu'à la rentrée. A Septembre!

RENTRÉE 1997. ϟ Sixième et avant-dernière année. Premier jour. « Mes pauvres enfants sans défense, sachez que cette année sera différente des précédentes, vous devriez songer à me rejoindre et à m'aider à effacer définitivement les sales sang-de-bourbe de nos vies. Ne vous croyez pas à l'abri parce qu'Harry Potter est auprès de vous, survivre une fois ne lui assure pas la vie éternelle, contrairement à moi. Je viendrais le chercher moi-même dans le château s'il le faut, à moins bien sûr que vous veniez me le livrer, ce qui, dans un acte de bonté, me ferait épargner votre école ainsi que vos vies. Ne me sous-estimez pas, vous n'avez pas le droit de douter! Mais pour les plus sceptiques, sortez donc dans la cour, et contemplez le début d'une nouvelle ère. » Les gens s'affolent, les cris fusent. Et moi je suis là, bousculée au milieu de tous, comme figée, n'osant à peine y croire. Les yeux rivés au sol, le regard pourtant vide, pas un mot. « Astoria? Ça va aller? » Les jambes tremblantes, mes yeux se ferment, puis plus rien. Le noir. Le vide. → Deuxième jour. « J'ai fais un rêve étrange cette nuit. Quelqu'un nous parlait d'une nouvelle ère. Puis les gens se sont mit à courir. Tous, tous tout autour de moi. Ils criaient. » Je marque une pause, un instant, le temps d'essayer de comprendre ce que je pouvais bien faire ici à l'infirmerie. En vain. « Il y avait cette petite fille aussi... morte, juste à l'entrée du château. » Daphné, assise à mon chevet, me regarde, l'air peinée. « C'était pas un rêve, Astoria. Ça s'est vraiment... passé. »